Arrivée à la forteresse de l'Ordre de la Licorne.

Aldraien a écrit:Ou quand la nuit tombe sur une décision…

Depuis un moment à présent la jeune femme ne cessait de songer à son futur…Libérée de ses obligations en tant que soldat, elle profitait à présent d’une liberté qu’elle avait longtemps espéré sans pouvoir l’acquérir. Le soir, assise devant la fenêtre de sa chambre, elle observait les étoiles dans la nuit noire, espérant un signe d’elles pour lui indiquer quoi faire à présent, quoi faire pour se rendre encore plus utile.
Un mot c’était imposé en son esprit comme l’évidence même ce soir-là : La Licorne.
Oui mais seulement, elle n’avait toujours pas reçu réponse à sa missive, envoyée pourtant plusieurs semaines auparavant. Impatiente ? Non elle ne l’était pas, mais elle commençait à se demander si la lettre était bien arrivée à destination.

Dans le domaine de Grignan, tout était silencieux et la jeune femme n’entendait que le bruit des pas d’un domestique marchant dans le couloir devant la porte de sa chambre. Certainement Antlia et Appolline devaient-elles dormir depuis longtemps, tout comme la majorité du personnel.
Qu’importe elle devait aller vérifier, et ce soir. Ald n’aimait pas remettre les choses au lendemain.
Elle devait donc à présent s’habiller, optant pour sa traditionnelle tenue aux couleurs de Grignan, rouge et or, et sa chemise portant le blason des Kennedy. Nuits fraiches obligent, elle mit sur ses épaules sa longue cape blanche qui peut-être la protégerait un peu du froid.

Sortant le nez dans le couloir, elle tomba -nez-à-nez justement- avec l’une des domestiques occupée à accomplir ses tâches nocturnes. D’un geste de la main, elle fit signe à la toute jeune femme de venir près d’elle et se pencha à son oreille pour lui murmurer :

Descends aux écuries, tu devrais y trouver un palefrenier occupé à soigner les derniers chevaux, dis lui de préparer Destinée, je pars dès que possible. Dépêche toi je te prie.

En moins de temps qu‘il n‘en fallait pour le dire, la domestique se trouvait déjà au bout du couloir avant de disparaitre complètement de son champ de vision.
Sourire en coin, elle entre à nouveau dans sa chambre et prend parchemin et plume pour prévenir sa future suzeraine. Un simple mot, elle comprendrait.

Partie à Ryes.

Elle laisse le message sur son bureau et file aux cuisines prendre des vivres pour le voyage. Quinze jours, il fallait prévoir quinze jours de nourriture au moins. La nourrice s’occupera de ses fils durant son absence, elle ne pouvait la prévenir mais Antlia le ferait surement.
Nourriture en sac, elle se dirige vers les écuries où sa jument l’attend déjà prête à prendre la route, même impatiente, peut-être avait elle ressenti l’humeur enjouée de sa maîtresse. La femme met le pied à l’étrier, se hisse sur sa monture et d’un claquement de langue fait avancer sa jument tranquillement jusqu’aux portes que le garde s’empressa d’ouvrir en reconnaissant la Louve.

La jument cherchait déjà à accélérer le rythme du voyage à peine les portes de Grignan franchies en tirant sur les rênes…Elle savait ce qu’elle voulait cette bête, et Ald le savait bien, les chevaux de race frison étaient souvent des chevaux têtus. Un soupire suivi d’un sourire, puis la femme relâche la pression sur les étriers et murmure un « Vas-y » . Pas besoin de lui dire deux fois, la jument se lance au galop sur les routes menant à Ryes, menant à la Licorne.



Non-loin de Ryes, une quinzaine de jours plus tard.

Le voyage avait été long, mais rien n’aurait pu empêcher Ald de se rendre à la Forteresse afin de poser sa question de vive voix. Souvent, la femme et sa monture avaient fait des pauses au bord de ruisseaux afin de se désaltérer et se rafraichir, car malgré les nuits fraiches, les journées passées à chevaucher au soleil étaient encore bien chaudes.
Les villages traversés assez fréquents, elle en profitait pour se reposer dans une auberge, se laver ou faire nettoyer ses vêtements salis par la poussière de la route.

Au petit matin, elle venait de passer Lisieux et se dirigeait à présent à travers une forêt, la forêt Leixovienne si elle se fiait aux dires des personnes entendues ça et là sur le chemin. Une forêt assez dense où elle pouvait voir de nombreux charbonniers entrain de travailler avant de finalement déboucher sur la destination de son voyage en fin de journée.
Des yeux grands ouverts en découvrant l‘endroit, jamais elle n’aurait imaginé Ryes comme un bourg de si grande taille, aussi grouillant d’activités même alors que le soleil n’allait plus tarder à se coucher. Mais le plus impressionnant n’était pas là, c’était la grande forteresse qui dominait le village tout entier de par sa prestance qui attirait le regard de la femme, il aurait fallu être idiot ou complètement fou pour s’en prendre au village ou ses habitants après avoir levé les yeux vers la Forteresse.

Traversant le village au pas, elle gravit ensuite le sentier en lacet pour arriver devant le pont-levis. Levant les yeux, elle ne put que rester sans voix devant la majesté du bâtiment. Peut-être un jour découvrirait-elle ce que cache la herse, mais pour l’heure elle n’en était pas là.
La rouquine mit donc pied à terre et depuis le pont-levis prit une voix forte pour se faire entendre.

Holà de la herse ! Je me nomme Aldraien et souhaiterait parler à un membre de la Licorne je vous prie !!
Si possible face à face et sans crier…ajouta-t-elle d’une voix normale car elle ne souhaitait pas tenir conversation à ce ton durant plusieurs minutes. Sourire aux lèvres et main posée sur la garde de son épée, elle attendait à présent une réponse.

sepa a écrit:Sepa aérait entre la herse et le poste de garde, toujours en se demandant si du monde viendrait au sein de la forteresse. Le temps était beaucoup plus doux qu’il y a quelques mois, ce qui rendait les tours de garde un peu plus agréable et gérable. Enfin quelque soit le temps, il devait quand même être à son poste pour accueillir les nouveaux visiteurs ou membres de la Licorne. N’ayant trop rien à faire, il regardait autour de lui puis pensait à pas mal de chose vis-à-vis de son avenir aussi bien en couple que dans ses activités au sein de la Licorne et son duché.

En fin de journée, il entendit des bruits venant du chemin qui venait en direction de Ryes, il resta figé pour voir s’il ne s’était pas trompé. Rare était les personnes qui arrivaient à l’heure là. Ce ne pourrait être un entretien prévu, qu’allait-il encore arriver comme péripétie au Chinonais ? Il avait été pas mal gâté sur les anciennes entrées non prévu. Il espérait que ça n’allait pas être la même chose, surtout à cette heure. Enfin bref, il n’eut pas le temps d’avancer qu’il entendait déjà crier devant la grille. L’Escuyer se demandait s’il n’était pas invisible. Il s’avança, vers la herse, droit et ferme.

Ola, ne criez point, je ne suis pas sourd. Pourrais-je connaitre les raisons pour vouloir voir un des membres de la Licorne? Je ne peux vous laisser entrer ou demander que quelqu'un se déplace sans en connaître plus à votre sujet et les raisons que vous soyez devant cette herse.

Sepa ne bougea pas et resta droit. Même s'il commençait à se faire tard, il ne devait pas faiblir

[HRP : désolé du retard et d'avoir fait si court]

Aldraien a écrit:Serait-ce la vieillesse qui la rendait aveugle pour qu’elle ai crié ainsi sans avoir vu l’homme juste sous son nez ? Elle reporta son regard sur l’Escuyer et lui sourit, comme pour s’excuser d’avoir malmené ses oreilles. Il avait l’allure d’un garde, et la carrure, nul doute que si elle n’avait ne serait-ce qu’esquisser un mouvement pour dégainer son épée, il l’aurait mise hors d’état de nuire en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Peut-être paraissait elle menaçante, aussi elle retira sa main de sur son épée pour la laisser simplement le long de son corps.

Ola, ne criez point, je ne suis pas sourd. Pourrais-je connaitre les raisons pour vouloir voir un des membres de la Licorne? Je ne peux vous laisser entrer ou demander que quelqu'un se déplace sans en connaître plus à votre sujet et les raisons que vous soyez devant cette herse.

Elle rougit légèrement, comme gênée et prit une inspiration avant de répondre:

Veuillez m’excuser, je ne vous avais pas vu, trop aveuglée par la beauté de cette forteresse certainement.

Bien sûr vous pouvez connaitre les raisons de ma venue et de ma demande. Je me nomme Aldraien, future vassale de l’Etoile, je viens du Lyonnais Dauphiné. Si j’ai décidé de venir ici ce jour, c’est pour prendre nouvelles en personne de ce qu’il est advenu de ma lettre concernant ma demande d’adhésion à la Licorne. En réalité, non pas que je sois impatiente, mais je l’ai envoyé voilà maintenant plus d’un mois, et je m’inquiète sur le fait qu’elle soit bien arrivée à destination.

Voyez vous, devenir membre de votre Ordre me tient vraiment à cœur, et je m’en voudrais de m’être trompée de destinataire et de briser par la même occasion mon rêve pour cette raison, quelque peu bête, vous l’avouerez…Je viens donc moi-même vérifier ce qu’il en est, si ma lettre est bien arrivée à la bonne personne ou non.

Aldraien a écrit:Retour en arrière..

Le fameux jour de son arrivée, on lui avait finalement demandé de patienter car patience était vertu, car il fallait attendre le temps que tout se décide. Elle allait prouver que cette vertu était bien présente chez elle, belle et bien présente. Elle avait donc respectueusement salué le garde puis était partie non-loin de la herse, dans un endroit tranquille où elle ne dérangerait personne et s’était affairée à monter sa tente. Elle ne bougerait pas non, elle montrerait sa détermination. Et puis l’hiver n’était pas encore là, il ne faisait pas encore très froid, de plus elle avait prévu quelques réserves de vivres, pas grand-chose certes, mais de quoi tenir quelques jours tout au moins car elle n’avait finalement pas mangé autant qu’elle le pensait.
C’est donc le sourire aux lèvres que sa patiente attente démarra.

Environ un mois plus tard.

Ce matin là, la jeune femme s’était levée très tôt, car l’avenir appartient aux gens qui se lèvent tôt…Enfin c’est surtout que si elle souhaitait trouver quelque chose à se mettre sous la dent, il fallait bien se lever pour aller chasser. Et puis…vous vous doutez que ses quelques vivres étaient épuisés depuis bien longtemps et, n’ayant pas prévu d’argent pour pouvoir acheter quoi que ce soit au marché de Ryes, c’est donc par ses propres moyens qu’elle devait se nourrir. Bien heureusement pour elle, ses quelques années d’enfance passées avec son père lui avait appris deux choses : d’une part, à se tenir prête à toute éventualité, d’autre part, à chasser le petit gibier en fabriquant des pièges.

De ce fait, la population de lapins de Ryes avait considérablement diminuée car ce n’était pas très malin un lapin et ça tombait dans le plus simple des pièges…Pas de pitié donc pour la jeune femme vis-à-vis de ces pauvres petites bêtes qui lui remplissaient bien le ventre. De la viande à chaque repas, un feu pour la faire cuire et réchauffer par la même occasion la rouquine, et son épée, elle ne demandait rien de plus.
Alors quand un volatile vint se poser en début de matinée près de son campement, Ald vit là une aubaine, une chance inestimable de pouvoir se mettre un poulet sous la dent ce jour-là ! (poulet qui n’était qu’un pigeon, n’est-ce pas) Attrapant donc sa dague, elle approcha avec prudence de l’oiseau, prête à bondir sur lui pour le déplumer et le mettre à cuir sur le feu…doucement, tout doucement, et l’oiseau ne bouge toujours pas….un pas de plus, pas de réaction. Un pigeon suicidaire ? Sans doute. La salive lui monte à la bouche, s’imaginant déjà à croquer la bestiole, il avait l’air bien gras en plus. Mais soudain, alors qu’elle s’apprête à bondir…un message ! L’oiseau était en fait un messager…et elle avait failli en faire son repas !

Quelques heures plus tard et le ventre vide, elle regardait dépitée l’oiseau reprendre son envol en direction de la forteresse. Dépitée, certes, car le ventre vide, mais heureuse d’avoir reçu cette réponse, elle en bouillonnait même de joie intérieurement et se retenait de la crier pour que tous les chevaliers l’entendent. Elle ne mangea pas se jour là, mais la joie et l’espoir furent sa nourriture. Peut-être bientôt pourrait elle revenir à cette porte, montrant fièrement la missive lui annonçant qu’elle pouvait pénétrer en les murs de la forteresse.
Et son attente se poursuivit, dans la bonne humeur toujours.

Deux mois après la joie…un nouveau surnom.

Elle avait perdu de la graisse la rouquine durant ces deux nouveaux mois d’attente, mais elle avait gagné en muscle et en sagesse également, sagesse concernant la chasse des lapins bien évidemment. Déterminée toujours, elle ressemblait presque à une ermite pour qui l’aurait regardé de loin. Bon, sans la barbe certes. Ses vêtements étaient presque en lambeaux et elle s’efforçait de les raccommoder au mieux afin d’être plus ou moins présentable si une missive lui parvenait. Incollable à présent sur la chasse aux lapins, un problème se posait cependant à elle : les lapins se faisaient rares. Sa solution de secours ? Oui bien sûr elle en avait une, c’est qu’elle est futée la petite, surtout quand il s’agit de son estomac. Elle avait donc opté pour la pêche, ayant repéré un petit ruisseau où elle se désaltérait et se lavait depuis quelques mois maintenant et où elle avait découvert quelques petits poissons. Sa dague lui servait beaucoup ces temps ci, elle comprenait pourquoi ses instructeurs à l’Ost lui avaient toujours rabâché les différents usages de cette lame.

Quand elle ne se ridiculisait pas à tenter de pécher un poisson et à finir trempée, elle s ‘entrainait. Oui, car elle restait avant tout une combattante, ancienne soldat, et pour qui l’épée représentait le pouvoir de sauver des vies. Pour cela donc, elle ne pouvait se laisser le loisir de perdre de son talent et s’astreignait à un entrainement quasi quotidien. Pas de cape, pas de col, simplement sa tenue en piteuse état et la sueur sur son front lorsqu’elle tenait son épée et s’exerçait contre un adversaire imaginaire. Esquives, parades, différentes sortes de coups, mouvements, elle passait tout en revu, chaque jour, malgré le froid, la pluie et dans peu de temps, la neige.

Si elle avait pu se douter que plus tard pour la présenter on la surnommerait « celle qui a planté sa tente devant la porte », sans doute aurait elle sourit, après tout c’était un moyen comme un autre pour que tous la reconnaisse et ça l’amusait bien. Pour le moment elle patientait simplement avec en elle la foi de ne pas voir les premiers bourgeons renaître depuis cette tente, peut-être même l’espoir de ne passer l’hiver sous la neige, mais s’il le fallait, elle le ferait sans hésiter, rien ne pourrait la faire lâcher prise, et surtout pas un vulgaire petit hiver alors que sa détermination était un glacier. Les journées se poursuivirent donc ainsi, en l’attente du prochaine épisode…

sepa a écrit:Cela faisait un moment qu’il n’était pu responsable du poste de garde mais il venait de temps à autre rendre visite à ses frères et sœurs qui étaient dorénavant à sa place. De petits renseignements aux nouveaux en cas de besoin et prendre des nouvelles sur les nouveautés qui auraient pu être mise ne place, il était toujours bon de savoir les changements qui pourraient venir. Pensant à ses débuts au poste de garde, celui-ci lui avait permis d’évoluer dans la patience et émettre quelques petites directives étant donné qu’il avait deux personnes qui étaient à ses « ordres », bien qu’il n’y avait aucunes autorités et qu’une bonne ambiance régnée entre chaque homme du poste. Aux dernières nouvelles, rien n’était très actif vu les changements qui étaient en cours.

Sepa connaissait l’attente qui était dur pour être à la herse, il se décida alors d’aller rendre visite à la personne qui devait se tenir derrière la barrière. Il avançait tranquillement quand il vit une personne avançait en direction de la grille, il la connaissait l’ayant déjà vu, il y a plus de deux mois. Voyant sa tenue, il se posa la question si celle-ci avait reçu une missive lui disant qu’elle aurait un entretien dans peu de temps. Enfin, il alla à l’entrée et attendit que celle-ci parle en espérant que son frère d’arme puisse répondre. Celle-ci approchant, elle ne parla pas et ne sortit rien, en regardant son frère qui était à coté de lui, il prit les devant.

Bonjour, je vous reconnais. J’ai l’impression que vous attendez toujours votre requête pour un éventuel entretien. Aux dernières nouvelles, votre candidature a bien été remise mais le Haut Conseil est fort occupé donc il vous répondra en temps et en heure.

Sepa attendit un instant avant de reparler, attendant que celle-ci lui pose d’éventuelles questions.

Humm, seul aide que je peux vous apporter, c’est d’aller dans le village de Ryes en attendant.

Sepa fit un léger sourire assez gêné de pas pouvoir mieux la renseigner.

Aldraien a écrit:Ce matin là, la Louve comme on l’appelait parfois, baladait aux abords de la forteresse, à l’affut d’un quelconque lapin à se mettre sous la dent, malheureusement, si elle était bien là, les lapinous, eux, manquaient à l’appel. Elle marchait donc à pas lent, l’espoir de voir une petite bête poilue diminuant au fur et à mesure que le temps passait et se profilait chose qu’elle n’appréciait pas à l’horizon, horizon de plus en plus proche pour son plus grand malheur et celui de ses vêtements déjà en bien piteux état : la pêche. Mais pour l’instant, elle refusait de se résoudre à cette solution de dernier recours et continuait d’espérer.

Soudain, alors qu’elle passait à proximité d’un buisson, le petit animal détala juste sous ses yeux et elle resta un moment là, abasourdie, avant de se mettre à courir après la bestiole, dague à la main. C’est que ça courrait vite ces petites bêtes, mais Ald était agile et c’est à grandes foulées qu’elle parcourait la toundra ryessienne et elle aurait continué à courser son repas si un caillou diabolique n’était pas venu se mettre sur son chemin et la faire s’étaler de tout son long, tête la première.
Poussant jurons et insultes incompréhensibles que le narrateur ne détaillera pas ici, par égard pour les âmes sensibles, la jeune femme se mise assise sur le sol, regardant son repas disparaitre sous ses yeux à petites foulées.

Se relevant en grimaçant, le front et les genoux écorchés, elle retira la poussière sur ses vêtements en les frottant un peu avec sa main puis elle grommela, encore une journée avec le ventre vide…Finalement elle décida de retourner à la tente et dormir, c’était le meilleur moyen de ne pas avoir faim. Tranquillement donc, elle marcha en direction de son logement précaire, passant non-loin de la porte de la forteresse. Soudain, une voix, et instinctivement la Louve pose la main sur la garde de son épée, reflexe de l’ancienne soldat, toujours sur ses gardes. Lentement elle se retourne pour voir qui lui parlait, soulagée de voir qu’elle connaissait cet homme pour l’avoir rencontré une fois. Elle se détend, lâche son épée et écoute l’homme avant de lui répondre, un peu gênée de l‘apparence qu‘elle offrait au sieur. Elle n’avait pas eu de discussion depuis un moment maintenant et sa voix fut un peu cassée lorsqu’elle prit la parole.

Bonjour à vous…Je vous reconnais également, c’est vous qui m’avez parlé lorsque je me suis présentée aux portes de la forteresse il y a trois mois. Je vous remercie pour les nouvelles, j’ai eu réponse du Haut Conseil voyez vous, j’attend à présent la date de l’entretien patiemment. Je me doute bien que le Haut Conseil est fort occupé et j’attendrai le temps qu’il faudra.
Par contre…je n’irai pas au village, je n’ai pas d’argent pour pouvoir acheter quoi que ce soit là-bas, pas même de quoi manger. Je vais continuer à patienter dans ma tente, je me débrouille pour subvenir à mes besoins n’vous en faites pas…Et puis le défi ne serait pas aussi intéressant à réussir si j’étais tranquillement installée au chaud à pouvoir manger quand j’en ai envie.

Elle lui sourit, il ne la connaissait pas encore et par conséquent il ne savait pas son ardeur à tout vouloir réussir par elle-même quoi qu’il arrive, sans aide extérieure, même si cela pouvait parfois lui apporter des problèmes, voir la mettre en danger. Elle se souvenait d’ailleurs d’un épisode à Briançon…une auberge, des brigands et des otages, et elle, armée face à eux pour protéger ces personnes innocentes. Elle en était ressortie dans un bien piteux état, aux portes de la mort, mais aucun des otages n’avaient été blessés. Idem de toute sa carrière de soldat, jamais elle n’avait refusé de relever un défi parce que celui-ci semblait trop dur. Enfin, ce jeune homme finirait par la connaître.

Aldraien a écrit:Elle était retournée à ses occupations après la petite discussion avec le jeune garde de la forteresse qui était reparti sans vraiment avoir pu l‘aider.
Les journées reprirent leur défilement, longues, si longues, les unes après les autres, se succédant lentement vers l’hiver…
Trois semaines plus tard, le froid s’était définitivement installé à Ryes et devant la forteresse…Les lapins étaient une espèce en voie d’extinction au domaine et les poissons se faisaient rares dans le ruisseau. Si bien que la rouquine prenait sur ses réserves.
Dans le logis de fortune qu’avait dressé Ald, la rudesse mordante du froid n’avait aucune pitié et la jeune femme était frigorifiée, recroquevillée sur elle-même en serrant contre elle ça cape qui ne protégeait pas grand-chose du froid. Le problème étant qu’elle ne pensait pas attendre là jusqu’à l’hiver et qu’elle n’avait rien prévu de plus chaud que ces habits de fin d’été, et presque aucune tenue de rechange, autant dire que la rousse était dans une situation peu enviable.

Pourquoi n’avait elle pas abandonné ?
Parce qu’entrer à la Licorne était ce qui lui tenait le plus au cœur et qu’en aucun cas elle ne renoncerait, quoi qu’il arrive, même si elle devait finir congelée dans sa tente. Certes les conditions étaient difficiles, certes elle était dans un état pitoyable et peu présentable, mais sa volonté était un roc qui ne s’était pas effrité une seule fois durant tout ce temps, inébranlable, intouchable, quel que soit le temps dehors, ou la faim dont se plaignait son ventre. Un sacré défi que celui qu’elle s‘était lancée, mais il n’était pas dans ses habitudes de baisser les bras ou d’abandonner.
Cependant ce jour elle était restée dans sa tente sans bouger au lieu de chercher son repas du jour, pourquoi ? Fiévreuse, migraineuse, des courbatures dans tous les membres, bref, elle avait attrapé froid. Pas étonnant cela dit vu le temps et la tenue de la jeune femme. Elle avait donc décidé de rester une journée à l’abris, s’octroyant quelques heures de sommeil pour récupérer et tenter de faire baisser la fièvre, mettant de côté des choses moins urgentes comme manger ou boire, du moins du point de vue de la jeune femme à ce moment là.

Son sommeil était agité, glacé, et des rêves étranges se promenaient en son esprit, la faisant parfois plonger en l’un d’eux. Rêves ou retour en arrière ? Personne n’aurait pu le dire, sans doute même elle n’aurait pas pu.
Papa, qu’est-ce que c’est ? Une jeune enfant, 5 ans tout au plus, parlant à son père en désignant un objet qu’il tient en main, un objet brillant au soleil et qui illumine les yeux émeraudes de la petite fille, comme toute nouvelle chose qu’elle avait l’occasion de découvrir.
C’est une épée. Une lame, qui coupe.
Voix douce, elle s’en souvient, et à la fois pleine de fermeté lorsqu’il en parlait.
A quoi ça sert ? Regard interrogateur de la petite, assise dans l’herbe.
A protéger ceux que tu aimes quand le besoin s’en fait sentir…A protéger ceux qui en ont besoin. Regard incompréhensif de la demoiselle. Un jour tu comprendras. Elle hoche la tête, observant son père ou plutôt l’admirant, entrain de faire quelques mouvements avec sa vieille épée. Elle avait été marquée par ce jour, son premier contact avec une arme même si ce n’était que par la vue…Elle n’avait jamais oublié les paroles de son père ce jour là, lui qui n’était que paysan mais qui apportait tant d’importance à pouvoir défendre les siens…

L’image se dissipe, nouveau rêve…deux ans plus tard…nouveau mauvais rêve. Dans son esprit, une nouvelle image se forme…des flammes, des cris, une petite rouquine paniquée au milieu de tout cela. Elle est cachée, personne ne peut la voir de sa cachette, mais elle voit tout, tout, même ses parents assassinés sous ses yeux par des brigands attirés uniquement par le gain matériel. Une dernière image, le dernier regard de son père lancé vers elle, regard d’excuse et de demande de pardon. Elle est seule maintenant, elle le sait. Les brigands ont tout brûlé, elle n’a plus rien…un cri, un hurlement de protestation contre cet avenir de solitude dont elle ne veut pas…
Un réveil en sursaut.
Quinte de toux pour la jeune femme qui prend sa tête entre ses mains, haletante et tremblante. C’est de ces rêves que venaient ses convictions…ce pour quoi elle se battait. Prenant le linge trainant dans un récipient contenant un peu d’eau, elle se le passe sur le visage puis s’allonge à nouveau, cherchant le sommeil, bien en vain certes, de trop nombreuses pensées en son esprit. Un faim trop grande en son estomac, mais au moins elle restait tranquille en attendant que la fièvre se décide à diminuer.

Antlia a écrit:[Un jour de décembre....]


Sortie de la Bibliothèque où elle avait récolté bon nombre d'informations sur le sujet de son étude, vélins en main elle passa devant le poste de garde par hasard.


Passage devant la herse et curieuse elle s'en approcha. La vaste entrée où tous les Licorneux étaient passés, fort de leur assurance ou la peur au ventre ou peut être un j'en-foutisme ... allez savoir. Elle sourit à cette herse passée qui avait changé sa vie pour jeter son regard un peu plus loin.
Elle vit la tente de fortune de Ald.. elle était encore là ? Personne ne lui avait donc dit? Et quelqu'un était il passé?


Son amie de toujours.. Au plus loin de ses souvenirs, à la naissance de sa fille elle était présente . A la caserne de Montélimar, elle était là également, et croisait à Grignan son amie assez souvent . Lorsqu'elle lui avait appris sa demande pour entrer en la Licorne, le visage de l'Etoile s'était paré d'un sourire qui en disait long.
Elle était heureuse, et ne voyait que du positif à sa candidature. Elle avait donc hâte de voir ce que serait son entretien.

Ouverture de la herse, elle se faufile jusqu'à l'amas de tissu qui lui sert d'abri : abri de fortune qui sous la neige qui se profilait n'allait pas servir à grand chose.
Têtue oui mais il fallait aussi se montrer raisonnable et il existait un lieu tout à fait adéquat à l'attente de la rousse.
Enfin elle la débusqua en pleine contemplation du paysage, puis avec un doux sourire s'assied à ses côtés.

Bonjour Ald. C'est joli n'est ce pas ?

Instant de silence entre les deux femmes, silence lourd de sens, elles qui d'un regard pouvaient se comprendre.

Tu vas attraper la mort icelieu, et franchement, je n'y tiens pas. Viens donc avec moi à l'auberge du vieux François. Déjà je te paierais un verre de ce que tu désires.

Après on verra ce que tu souhaites faire, mais attendre ici maintenant qu'il n'y a plus de lapins et que la neige va paraître ...
Sache que ton entêtement a du bon, et que tu seras appelées, aucune inquiétude là dessus.

Elle plaça sa main sur celle de son amie et lui adressa un sourire, lui laissant le libre choix d'accepter ou non .

Aldraien a écrit:Retour en arrière, quelques temps en arrière, pas longtemps certes, mais le temps est relatif.

La rouquine avait été malade…environ trois jours. Malade à ne plus pouvoir se lever, allongée à attendre que ça passe, et ça avait finalement passé. En forme à nouveau, elle avait retrouvé son légendaire courage et sa fougue, presque totalement sans doute si elle n’avait pas eu un léger soucis de nourriture, un manque. Il n’y avait plus de lapins.
Quoi manger alors ?
Elle pouvait certes continuer à pêcher, mais là encore, ça ne durerait qu’un temps et puis ça caillait quand même un peu maintenant. Les neurones de la rousse avaient presque failli griller ce jour-là, deux jours après son rétablissement en fait, alors qu’elle songeait à comment se nourrir.

Piquer les noisettes des écureuils ? Ce serait un peu sadique de sa part, et que mangeraient ils après…
Manger les écureuils eux-mêmes ? Non, les écureuils étaient trop rapides et agiles pour elle.
Manger l’écorce des arbres ? Bah, c’était pas terrible comme goût ça…
Tuer du gros gibier à coup d’épée ? Ca va pas non ! Barbare !
Bon, ça va hein…
Vous l’aurez compris, le dialogue intérieur qui faisait rage continua ainsi pendant quelques minutes encore avant que la jeune femme ne finisse par aboutir à une solution qui n’en était pas une : chercher encore du poisson et tenir le plus longtemps possible.

Un beau matin de décembre.

La journée promettait d’être ensoleillée malgré le froid de fin d’année qui avait gelé les terres, aussi, la rouquine décida d’en profiter un peu pour faire du tourisme, même si elle connaissait les environs de la forteresse comme sa poche à présent.
Naturellement, elle se dirigea vers le ruisseau afin de pouvoir s’y désaltérer et effectuer un éventuel repérage poissonnien en vue d’un tout aussi éventuel repas. Enfin arrivée, elle se mit assise sur l’herbe encore humide de la rosée matinale et retira ses bottes et ses bas afin de laisser la verdure chatouiller doucement ses orteils puis elle se rapprocha de l’eau et trempa carrément les pieds dedans. Fraicheur revigorante, bien que très fraiche tout de même, la morsure de l’eau lui permit de se réveiller totalement et de se rendre compte du paysage qui l’entourait.

Sur les rochers du ruisseau, l’eau ruisselante brillait sous les rayons du soleil qui filtraient au travers des quelques arbres au-dessus d’elle.
Une douce musique envahissait l’endroit, le bruissement des buissons où s’activaient sans doute quelconques animaux, le discret craquement des branches sous les pattes des chevreuils ou autre gros gibier matinal, le bruit de la petite chute d’eau, le chant des quelques oiseaux encore présents. La rousse ferme les yeux un instant pour savourer la belle mélodie, puis les ouvrent à nouveau, posant ses émeraudes sur un chevreuil sortit de sa cachette pour boire à quelques pas seulement d’elle. Un sourire illumine son visage, de voir la nature ainsi en éveil quelle que soit l’heure…

Soudain, un bruit différent des autres, humain celui-là, elle en est sure. Pas le temps de se retourner que la personne est déjà assise à ses côtés, elle pose son regard sur elle : boucles d’un blond d’or, visage dessiné tout en finesse, sinoples ouverts sur le monde, curieux.
La rousse se détend, un tendre sourire s’affiche sur ses lèvres. Son amie, sa sœur de cœur, sa famille, c‘était elle.
Son bonjour, elle n’y répond pas, nul besoin, elles se comprennent sans mots et Antlia savait à quel point la rouquine était heureuse de la voir à côté d’elle. Elle se doutait du motif de sa venue ici et attendait simplement qu’Antlia l’aborde, sans la contredire, en regardant simplement le paysage dont la voix ne sa suzeraine ne venait en rien troubler la sérénité.

Tu vas attraper la mort icelieu, et franchement, je n'y tiens pas. Viens donc avec moi à l'auberge du vieux François. Déjà je te paierais un verre de ce que tu désires.

Après on verra ce que tu souhaites faire, mais attendre ici maintenant qu'il n'y a plus de lapins et que la neige va paraître ...
Sache que ton entêtement a du bon, et que tu seras appelées, aucune inquiétude là dessus.

La mort ? Oh elle ne serait pas morte si prêt de la forteresse non…Elle était bien restée quelques jours alitée mais cela Antlia n’en saurait pas, hors de question de l’inquiéter pour quelque chose de passé.
Quant à aller à l’auberge…allait-elle y aller ? Il n’y avait plus de lapins, c’était une constations, cela faisait des jours qu’elle n’en avait plus vu un seul, s’il en restait, ils devaient bien se cacher. Elle réfléchit encore, en allant à l’auberge elle pourrait boire et manger, elle pourrait changer ses habits dans un bien piteux état…Ce qui l’embêtait le plus dans l’histoire étant de devoir abandonner là son défi, mais il fallait bien se rendre à l’évidence : ce serait pure folie de continuer avec le plus gros de l’hiver qu’il restait à passer. Alors elle cesse son entêtement et pour une fois décide d’être raisonnable, pose son autre main sur celle d’Antlia et lui sourit.

Tu as raison mon amie, je crois qu’il est temps de me rendre à l’évidence, je ne puis faire l’ermite plus longtemps icelieu sous peine de mourir congelée avant même d’avoir franchit la herse une seule fois.
Je te suis à l’auberge, et tu sais déjà ce que je vais boire je suppose...cela fait des mois à présent que je n'y ai plus touché. Un sourire, puis, gênée : Ah, et…désolée pour ma tenue, je ne suis pas du tout présentable je le sais.
Elle se lève ensuite en riant et tend la main à Tlia pour l’aider à se relever à son tour avant de se rendre toutes deux à l’auberge.